Interview de Kristina sur lequipe.fr

Sur le court n°11 de Roland-Garros, Kristina Mladenovic enchaîne les séries. Ses frappes sont toujours aussi tranchantes, sa concentration optimale et sa rigueur au rendez-vous. Elle se prépare pour les tournois de Cagnes-sur-Mer, Saint-Gaudens, Strasbourg, Roland-Garros et peut enfin «jouer sans appréhension ». A ses côtés, Georges Goven lui prodigue ses conseils. Ses parents, Dzenita, ancienne volleyeuse, et Dragan, ancien handballeur et préparateur physique de sa fille, observent très attentivement. Le grand espoir du tennis féminin a besoin d'être dorlotée après une annus horribilis en 2010. Poignet en Australie, dos à Roland-Garros puis genou... Attention danger, glissent alors certains. Même pas peur, répond la jeune Française qui s'appuie sur son expérience, son entourage et son «caractère assez fort».

Elle ne peut pas jouer en 2010, mais elle n'a pas une minute à elle : rééducation, renforcement musculaire du haut, des abdos, natation... « Il y avait plein de choses à faire, note la 242e mondiale (171e mondiale le 12 avril 2010 à 16 ans). Sans oublier que je suis encore scolarisée, je suis en terminale L et je passe mon bac cette année.» La Tricolore n'est pas du genre à s'apitoyer sur son sort. Elle se bat, serre les dents (du bonheur) et s'accroche : « C'était dur, mais ce n'était pas la première fois que cela m'arrivait. J'ai été opérée à 12 ans et j'étais revenue plus forte. Avec un an et demi de retard, j'ai terminé n°1 mondiale juniors. Cette première expérience m'a fait tenir. J'ai passé cette nouvelle épreuve, je ne peux donc être que plus forte maintenant. Aujourd'hui, c'est pareil, cela ne me fait pas peur. Je sais que le jour où je serais très bien, il n'y aura pas de souci car je bosse dur. Le travail paie toujours.»

Et ce n'est pas de la forfanterie. Kristina Mladenovic est d'une étonnante maturité : «Mentalement, j'ai su passer cette épreuve. C'est peut-être ce qui fait ma maturité. Je vais avoir 18 ans, j'ai déjà connu quelques histoires assez difficiles, cela me renforce mentalement. Dans des étapes difficiles, j'acquiers de l'expérience et de la maturité plus vite que les autres.» Son regard bleu et franc parle pour elle. Comme son jeu, elle ne passe pas par les circonvolutions stériles. Elle va droit au but et sait ce qu'elle veut. Redescendue au classement, elle revient et gagne ses deux premiers titres sur le circuit dans des 25.000 dollars à Sutton et Stockholm. «Après une année blanche, je pensais que ce serait beaucoup plus long pour revenir, avoue l'élève de Georges Goven. Je suis super contente. »

Comme une Ferrari, il faut la manier avec précaution. Son physique d'athlète de 1,85 m est une force et une faiblesse. Elle en tient compte. «Apparemment, je dois encore reprendre ma croissance et je devrais prendre quelques centimètres (sourire). C'est une bonne et une mauvaise nouvelle. Je fais avec. Je progresse à ma vitesse et à ma façon. Tranquillement. Je ne veux pas me presser et jouer avec ma santé. C'est sûr que je ne peux pas progresser physiquement au rythme des autres, mais j'ai fait avec ma carrure et mon physique. » Elle ne regarde pas les autres, elle se fixe des objectifs et essaie de les atteindre. Elle grandit au propre comme au figuré. - Sophie DORGAN

A propos de la Fed Cup :

« C'est bien sûr dans mes projets et au plus vite, j'espère. C'est une compétition différente et qui fait du bien. Pour parler de la nouvelle génération, on n'attend que ça.» Pourquoi ne pas intégrer cette nouvelle génération ? «Quand je n'étais pas blessée en 2009, j'étais déjà championne du monde et 170e alors que je n'avais joué que sept tournois seniors. J'étais déjà prête. Les gens autour de moi me disaient pourquoi pas ? Je n'ai jamais été appelée. On n'a jamais eu trop d'explications, mais je l'accepte, c'est le choix du capitaine. » Joueuse de tempérament, elle glisse gentiment mais sûrement : «Beaucoup de gens se demandent pourquoi ne pas nous intégrer pour qu'on sente l'ambiance ? Par exemple, en Serbie, ma copine de 93 (Alexandra Krunic) a apporté le point décisif et selon Jankovic, elle a même tenu l'équipe. Cela faisait déjà deux ans qu'elle était dans l'équipe et elle s'était intégrée. Il y a un système en France différent, il faut l'accepter. Je trace ma route, je progresse et quand le jour sera venu, j'irais en équipe de France.»